Quelques nuages
Le pourquoi du commencement
Chère Deca,
Tapie dans mon silence, le corps engourdi par le souffle glacial du solstice d’hiver et le coeur transi par l’irrévocable, ne me tiens pas rigueur, mon amie, ma chère amie, si je suis restée un peu à l’écart pendant tout ce temps à appréhender le pire, bien sûr. Au fond, je ne faisais que d’attendre de bonnes nouvelles.
À cet effet, laisse-moi te dire que j’aurais tellement aimé entendre me dire: « Elle va mieux! Elle a bien hâte d’obtenir son congé de l’hôpital. D’ailleurs, elle sortira pour Noël, etc … »! Bref, j’espérais désespérement que tu retiennes ton souffle encore, et encore.
Or, bien que furtive et invisible, de semaine en semaine, j’étais là, d’abord à me douter que quelque chose n’allait pas.Puis, de jour en jour, je sentais aussi que cela devait être bien plus grave que ce que j’avais imaginé. Et enfin, d’heure en heure, je me disais que ça ne se pouvait pas que ton âme de poète s’envole ainsi, comme ça, tout doucement au beau milieu d’une froide nuit de décembre.
Comme si, après avoir été foudroyée par le destin, une petite hirondelle avait perdu le nord et se serait brusquement trompée de saison. En empruntant par mégarde le vague chemin de l’Ailleurs, aurait-elle donc été soudainement par trop éprise de chaleur et de lumière, qu’elle s’est cru capable de faire renaître le printemps en nous plus tôt que d’habitude …?
Peu importe tes desseins, mon amie, mais n’est-il pas juste de se rappeler que, pour la plupart d’entre nous, tu étais indéniablement hirondelle. Fragile et généreuse, un peu à la manière d’une diva-oiseau, tu aimais rassembler tes oisillonnes sous tes grandes ailes vaporeuses, afin de leur enseigner toute la beauté et la nitescence, mais aussi toutes les vicissitudes du vaste monde lesbien.
Mais, pour moi, cependant, tu étais, et resteras toujours, Deca. Une formidable complice, tantôt virtuelle, tantôt charnelle, mais toujours sensible, avec qui j’avais un plaisir fou à inventer des histoires aussi loufoques que fabuleuses, et surtout aussi, à commenter divers points chauds de l’actualité.
À propos, mais sans vouloir te paraître trop irrévérencieuse vu les « circonstances », figure-toi que je t’en avais justement mis un en réserve, pour l’occasion des Fêtes.
En effet, toute empreinte d’actualité, cette question ressurgit régulièrement, à l'approche des agapes de fin d'année: « Est-il cruel de gaver les canards pour obtenir des foies gras ? »
Où que tu sois, Deca, dis-moi, que ce sujet-là te mettra l’eau à la bouche ... Comme tu vas me manquer, chère amie!
À tout jamais … à toi pour toujours,
May West
23 décembre 2004
Chère Deca,
Tapie dans mon silence, le corps engourdi par le souffle glacial du solstice d’hiver et le coeur transi par l’irrévocable, ne me tiens pas rigueur, mon amie, ma chère amie, si je suis restée un peu à l’écart pendant tout ce temps à appréhender le pire, bien sûr. Au fond, je ne faisais que d’attendre de bonnes nouvelles.
À cet effet, laisse-moi te dire que j’aurais tellement aimé entendre me dire: « Elle va mieux! Elle a bien hâte d’obtenir son congé de l’hôpital. D’ailleurs, elle sortira pour Noël, etc … »! Bref, j’espérais désespérement que tu retiennes ton souffle encore, et encore.
Or, bien que furtive et invisible, de semaine en semaine, j’étais là, d’abord à me douter que quelque chose n’allait pas.Puis, de jour en jour, je sentais aussi que cela devait être bien plus grave que ce que j’avais imaginé. Et enfin, d’heure en heure, je me disais que ça ne se pouvait pas que ton âme de poète s’envole ainsi, comme ça, tout doucement au beau milieu d’une froide nuit de décembre.
Comme si, après avoir été foudroyée par le destin, une petite hirondelle avait perdu le nord et se serait brusquement trompée de saison. En empruntant par mégarde le vague chemin de l’Ailleurs, aurait-elle donc été soudainement par trop éprise de chaleur et de lumière, qu’elle s’est cru capable de faire renaître le printemps en nous plus tôt que d’habitude …?
Peu importe tes desseins, mon amie, mais n’est-il pas juste de se rappeler que, pour la plupart d’entre nous, tu étais indéniablement hirondelle. Fragile et généreuse, un peu à la manière d’une diva-oiseau, tu aimais rassembler tes oisillonnes sous tes grandes ailes vaporeuses, afin de leur enseigner toute la beauté et la nitescence, mais aussi toutes les vicissitudes du vaste monde lesbien.
Mais, pour moi, cependant, tu étais, et resteras toujours, Deca. Une formidable complice, tantôt virtuelle, tantôt charnelle, mais toujours sensible, avec qui j’avais un plaisir fou à inventer des histoires aussi loufoques que fabuleuses, et surtout aussi, à commenter divers points chauds de l’actualité.
À propos, mais sans vouloir te paraître trop irrévérencieuse vu les « circonstances », figure-toi que je t’en avais justement mis un en réserve, pour l’occasion des Fêtes.
En effet, toute empreinte d’actualité, cette question ressurgit régulièrement, à l'approche des agapes de fin d'année: « Est-il cruel de gaver les canards pour obtenir des foies gras ? »
Où que tu sois, Deca, dis-moi, que ce sujet-là te mettra l’eau à la bouche ... Comme tu vas me manquer, chère amie!
À tout jamais … à toi pour toujours,
May West
23 décembre 2004
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